Détail d'un disque de la discothèque du M'O+

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Titre du CD Terres d'Espagne. Musique d'orgue dans les royaumes de Philippe IV
Interprète(s) Damien Colcomb (FR)
Éditeur Hortus
Numéro d'édition 081
Site de l'éditeur http://www.editionshortus.com
Format audio DDD
Date d'enregistrement 14-16 V 2010
Minutage total 70:12
Date de réception au M'O 17/09/2010
Livret 36 pages (F, GB), composition, pas de registrations
Orgue(s) et/ou instrument(s) Correa de Arauxo, Coelho, Cornet, Kerckhoven
Compositeur(s) Lorris en Gâtinais (FR), Notre-Dame
Descriptif orgue(s)Lorris en Gâtinais, FR, Notre-Dame
x (FR) XVII/Koenig (FR) 1974. I/11
Accord orgue(s)555 dans l'échelle de La Rasette razette
ProgrammeCorrea de Arauxo
1. Tiento y discurso de segundo tono
6. Siguese la cancion de Tomas Crequilion llamada: Gaybergier
10. Siguese otro tiento de medio registro de tiple de segundo tono
van den Kerckhoven
2. Fantasia (C)
5. Fantasia (d)
9. Fantasia (e)
Cornet
3. Fantasia ottavi toni
8. Aria del Granduca
12. Fantasia primi toni
Coelho
4. Pange lingua sobre o canto chão do tiple de breves
7. Tento do terceiro tom natural
11. Tento do septimo tom natural

CommentaireL'orgue de Lorris en Gâtinais nous fut présenté d'abord par André Isoir, sur le CD Triton 331121. Vous êtes invités à relire ces lignes (CD_3474), et en particulier tout un paragraphe sur les qualités de l'instrument, qui restent évidemment d'actualité.
Quant à l'organiste Damien Colcomb, nous l'avons déjà rencontré à deux reprises. Le CD_3472 avait reçu un commentaire pour le moins tiède (il faudra, à la lumière de ce CD-ci, le réécouter...), mais avec le CD Alpha 064, l'horloge était remise à l'heure, puisqu'il prenait sa part dans le coup de cœur du M'O 84/22 (CD_3473), en jouant trois pièces de Correa de Arauxo déjà sur cet orgue de Lorris en Gâtinais.
Le programme de ce récital est fort intéressant, et reflète parfaitement le cousinage évident entre les organistes espagnols et flamands du XVIIe siècle (une parenté que défend et illustre depuis plus de quarante ans le signataire de ces lignes!). Dans le titre du CD comme dans son intéressant commentaire, Damien Colcomb fait cependant l'impasse sur les archiducs Albert et Isabelle d'Autriche, qui régnèrent sur la cour de Bruxelles de 1598 à 1621, date de la mort d'Albert, entraînant l'arrivée sur le trône de Philippe IV, d'autant plus que Philippe III, frère d'Isabelle, meurt à peine quelques mois plus tôt, le 31 mars 1621. C'est en réalité avec les archiducs que tout commence: Rubens est le peintre officiel de la cour dès 1609, et reste peintre de l'infante après la mort de son époux. Et c'est sous ces souverains que la cour de Bruxelles peut s'enorgueillir de réunir des organistes tels que Cornet, Bull et Philips. Si, techniquement, l'œuvre de Correa, publiée en 1626, se place sous le règne de Philippe IV, celles de Coelho, dédiées à Philippe III, datent de 1620 (pour la publication, par un imprimeur flamand de Lisbonne, il avait obtenu un privilège plusieurs années auparavant...), et de Cornet (qui, soit dit en passant, reste organiste à la cour jusqu'à sa mort, en 1633, et non jusqu'à 1626), n'ont rien à voir avec ce souverain. Rendons donc à Albert et Isabelle, le mérite qui leur revient!
Un autre sujet de discussion réside dans le choix de l'instrument: l'orgue des Pays-bas espagnols se caractérise entre autres par sa Flûte 4 et sa Sesquialtera (absentes à Lorris) et par la coupure des basses et dessus du clavier entre do et do# (ici entre mi bémol et mi). Une des propriétés essentielles de l'orgue ibérique de l'époque réside dans la coupure entre basses et dessus, entre les mêmes notes, de presque tous les jeux, alors que seules les deux anches de l'orgue de Lorris bénéficient de cette facilité, et encore, décalée d'une tierce. Enfin, ici ou là, l'accord est en principe franchement mésotonique. Ici, l'on nous parle d'un «tempérament d'école mésotonique», expression qui demanderait à être explicitée! Cela dit, l'essentiel est que l'orgue sonne bien, et c'est décidément le cas. Les puristes pourront donc couper des commas en quatre, les musiciens seront contents!
Le choix du programme, expliqué dans le livret, est excellent, varié et illustre bien l'objet de l'organiste, qui reste hélas muet sur ses registrations. Son jeu est parfait, volubile quand il le faut, agréablement varié et toujours bien maîtrisé dans les articulations, judicieusement et adroitement orné, vivant d'un bout à l'autre de cette grande heure de musique, qui s'écoute de bout en bout avec un plaisir à peine entaché par le bruit d'une mécanique qui ne peut sans doute pas être assimilée aux claquements des castagnettes pour la musique du plat pays...
Dans le «Tiento de medio registro de tiple» de Kerckhoven, l'auditeur attentif se demandera quelle raison justifie, pour la dernière phrase de la main droite, le remplacement du fort beau Cornet par une Trompette un peu acidulée dans l'aigu, ce qui entraîne un renforcement de la main gauche guère plus heureux. Le spécialiste se demandera par quel tour de passe-passe (sans doute un accord spécial du fa# en ré?) l'organiste arrive à jouer deux ré graves sur ce jeu anormalement coupé entre mi bémol et mi. Cette particularité inexpliquée dans le livret (sans doute le décalage d'une tierce de la tuyauterie du jeu?) n'était-elle pas en quelque sorte un avertissement donné par l'orgue à l'interprète: «conserve le Cornet, qui descend au do, ce sera plus beau!». Soit dit en passant, dans la belle Fantaisie du huitième ton de Cornet, sans doute l'organiste a-t-il dû déposer les trois tuyaux surnuméraires de la trompette pour permettre à l'accompagnement de la main droite de descendre jusqu'à la limite inférieure normale du do#.
En tout cas, voici un fort beau programme, très bien joué, sur un bel orgue: bravo!

Date du commentaire23/06/2011
  
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