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Coeur

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Titre du CD Johann Sebastian Bach. Die Kunst der Fuge
Interprète(s) Bernard Foccroulle (BE)
Éditeur Ricercar
Numéro d'édition 303 (2 CD's)
Site de l'éditeur http://www.ricercar.be
Format audio DDD
Date d'enregistrement IV 2010
Minutage total [54:07 + 41:24]
Date de réception au M'O 09/07/2010
Livret 32 pages + 6 pages de Digipack (FR, GB, DE); photo(s) de l'instrument: 3, composition et registrations
Orgue(s) et/ou instrument(s) Strasbourg, FR, Temple du Bouclier
Compositeur(s) J. S. Bach
Descriptif orgue(s)Strasbourg, FR, Temple du Bouclier
Thomas (BE) 2007. II/29 (+6)
Accord orgue(s)555 dans l'échelle de La Rasette razette
ProgrammeJohann Sebastian Bach. Die Kunst der Fuge BWV 1080

CD I
1. Contrapunctus 1
2. Contrapunctus 2
3. Contrapunctus 3
4. Contrapunctus 4
5. Contrapunctus 5
6. Contrapunctus 6
7. Contrapunctus 7
8. Canon alla Ottava
9. Canon alla Decima
10. Contrapunctus 12 rectus
11. Contrapunctus 13 rectus
12. Contrapunctus 13 inversus
13. Contrapunctus 12 rectus
14. Canon alla Duodecima
15. canon per Augmentationem in Contrario Motu

CD II
1. Contrapunctus 8
2. Contrapunctus 9
3. Contrapunctus 10
4. Contrapunctus 11
5. Contrapunctus 14
6. Contrapunctus 14, version complétée par BF

CommentaireQuatre mois après l'arrivée à la rédaction du M'O du coffret réunissant tous les enregistrements réalisés par Bernard Foccroulle de l'ensemble de l'œuvre d'orgue de Bach (16 CD's sur... 14 orgues, voyez CD_4285, dont le commentaire reste à écrire), nous arrivait la conclusion de ce formidable travail, que nous n'oserons pas, par souci d'originalité, qualifier de «point d'orgue magistral» de cette entreprise.
L'instrument choisi par Bernard Foccroulle est le magnifique orgue construit par Thomas pour le Temple du Bouclier à Strasbourg, dont il assura le concert d'inauguration en septembre 2007. Dominique Thomas indique: «Notre instrument cherche à aller aussi loin que possible dans la cohérence du style thuringeois». Pour ce faire, le modèle choisi est le grand orgue de Heinrich Gottfried Trost de Waltershausen, 1730, dont on retrouve certaines sonorités très caractéristiques, et aussi l'utilisation des jeux empruntés entre clavier et pédale, ici au nombre de six. La perfection sonore de l'instrument, la multiplicité des timbres, en particulier dans les huit jeux de fonds de huit pieds, ainsi qu'une acoustique d'une limpidité exceptionnelle faisaient de cet orgue un support parfait pour les savantes polyphonies du grand Cantor.
Les deux questions principales qui se posent à l'interprète abordant ce sommet de l'art baroque sont: dans quel ordre jouer les contrepoints, et comment les registrer. À ces deux interrogations, Bernard Foccroulle répond très simplement, donc fort efficacement.
L'ordre adopté ici est une division en trois groupes de l'ensemble: premièrement, les contrepoints à sujet unique (soit les contrepoints 1 à 7); ensuite, les quatre canons et les deux fugues-miroir (contrepoints 12 et 13, eux-même disposés en miroir); et enfin, les contrepoints à plusieurs sujets (8 à 11 et 14). Ordre, logique, clarté, évidence!
Pour ce qui concerne les registrations (merci de nous les communiquer dans le livret!), ce sont les mêmes qualités qui conduisent l'interprète à éviter de «sur-registrer». Tout d'abord, observons qu'il n'est quasiment pas fait usage de la pédale: choix très judicieux, car il convient d'éviter l'individualisation de la voix de basse (ou de toute autre voix d'ailleurs) dans ce tissu si homogène. Fort naturellement, ce n'est que dans les quatre canons (en fait trois d'entre eux) que l'interprète a choisi de jouer sur deux claviers. Partant évidemment du principe que la complexité de l'écriture contrapuntique demande une grande simplicité dans le choix des couleurs, Bernard Foccroulle, résiste à la tentation d'utiliser Mixtures, Sesquialtera, Tierce de l'Oberwerk, et même Octava 2 de ce clavier. Les anches apparaissent avec une extrême et judicieuse parcimonie. Seule exception à ce principe, le Contrepoint 7, joué sur un léger plenum (8, 4, 2, Quinte), avec les deux apparitions du thème en augmentation à la basse et au ténor sur la seule Trompette de la pédale: c'est discret et efficace! L'on n'entendra en fait un véritable plenum avec pédale que dans la version complétée du dernier contrepoint, sans lequel la cote pour l'accord des mixtures, dans l'échelle de la rasette aurait été un «X»!
Un mot enfin, sur le jeu de Bernard Foccroulle: il se dégage de son Art de la Fugue un rare sentiment de plénitude. Celle-ci ne dépend pas comme on pourrait le croire de prime abord de l'amplitude du son, mais résulte plutôt de la subtile conjonction de l'assurance, de l'excellence et de l'intensité, que l'on pourrait aussi bien exprimer par: maturité, perfection et profondeur. J'avais, jusqu'à l'avant dernière plage, réservé un beau «coup de chapeau» à cet enregistrement remarquable, car ici où là, un tempo encore plus large ne m'aurait pas déplu. Mais l'intelligence de la dernière plage a indiscutablement transformé l'essai...
Chacun sait que le dernier contrepoint de ce monument n'a pas été achevé par Bach. Plusieurs organistes se sont risqués à inventer une hypothétique conclusion, plus ou moins réussie, et souvent révélatrice d'un certain manque de modestie... Ce n'est ici guère le cas: Bernard Foccroulle termine en effet son Art de la Fugue par les plus beaux points de suspension de la musique. Mais dans ce que certains producteurs commerciaux auraient appelé un «bonus», il nous donne une version complétée qui mérite tout notre enthousiasme: il ne lui a pas fallu plus d'une minute (alors que, étrangement, le contrepoint ne dure que vingt secondes de plus que la version originale...) pour conclure:
Mon sentiment face à la question de l'achèvement du dernier contrepoint est ambigu: bien entendu, se mesurer au génie de Bach n'a aucun sens, et c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles j'ai préféré écrire une fin assez directe, sans fioriture ni modulation. Il n'est d'ailleurs pas impossible que Bach lui-même ait prévu une dernière section assez courte. On constate en effet que chaque section est plus courte que la précédente: la première section comporte 114 mesures, la deuxième 78, la troisième 40, et dans la version que j'ai complétée, la dernière en compte 25.
En outre, si on superpose le sujet principal aux trois sujets déjà présentés dans ce contrepoint, selon un résultat très certainement prévu par Bach, chacune des quatre voix est porteuse d'un sujet! C'est un phénomène unique dans ce cycle, et rarissime dans l'œuvre de Bach. C'est pourquoi il m'a semblé préférable que cette superposition des quatre sujets du dernier contrepoint n'ait lieu qu'une seule et unique fois, dans la tonalité de ré mineur.


cqfd [ce que Foccroulle démontre] brillamment!

Date du commentaire18/10/2011
  
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